J’imagine que tu as présenté Faustine à tes parents. Ça semblait imminent bien que tu m’aies dit prendre le temps avec elle. Tes habitudes ont dû prendre le dessus. Parce qu’à part rendre visite à tes parents le week-end, tu dors, tu ne fais rien d’autre. 

J’imagine que ça s’est passé comme il faut. Tu lui as laissé prendre ma place à tes côtés et tu lui as tenu la main ou tu lui as touché le dos. Tu as joué ton rôle d’enfant pourri gâté, et tu as sorti ta science sur un phénomène physique ou sur les attentats ou sur la dernière technologie en essayant de soumettre une idée de cadeau à ta mère en particulier. 

J’imagine que ton fils s’est tenu à peu près comme il faut, qu’il a tenté de parler de sa mère, qu’il s’est agité pour se faire remarquer. 

J’imagine ton père très gentil et avenant avec Faustine et ta mère la questionnant sur sa famille et son métier. 

J’imagine et j’ai mal. 

Ma sœur et mon beau-frère m’ont dit, lors de leur dernière visite, qu’ils t’ont vu plus heureux au retour de ton escapade avec tes amis. En effet, tu ne m’avais pas informée, comme d’habitude. Nous t’attendions. Tu es revenu bien longtemps après. Ils étaient outrés de cette absence de communication et du changement d’humeur démontré. Tu semblais très heureux, plus heureux là que toute l’après-midi passée avec nous. Ça les a choqués. Ils étaient interloqués. Et tout cela, c’était avant Paris. Ils ont vu la façon dont tu me considérais. J’étais absente à ton regard. Tu ne m’as même pas fait de bisou, tu es parti et puis c’est tout. 

J’ai su peu de temps auparavant, par toi, que la mère de ton fils était « ton coup de cœur ». Et tu ne m’en as pas dit plus. Et je me suis comparée à elle très vite. Le sentiment que tu éprouvais pour moi était sans commune mesure. Ça faisait des mois et des mois que tu ne m’approchais pas, que tu ne me touchais pas, que tu ne me disais pas que tu m’aimais. Mars, avril et mai ont été très critiques. Les mois précédents ont été plus que lourds. Un peu camouflés par ta proposition de partir en voyage loin d’ici. 

« Ça, c’est ton problème », me balances-tu concernant « l’étape du deuil ». Le sourire en coin et le regard vide, tu me dis : « À quelle étape es-tu du deuil ? » Pas si bien dit, bien sûr, parce que tu bafouilles et que tu parles dans ta barbe. Et je te reprends : « Le deuil ? » Et tu ajoutes : « La tristesse ? » Et je finis par renchérir : « Plus que ça, la tristesse, le chagrin, la peine, la souffrance, la douleur » tout en me remettant à pleurer, ressentant le peu d’égard porté sur moi. Tu me diras, j’ai l’habitude. Ensemble ou pas, tu étais grinçant. « Le problème est social avec Faustine, elle n’a qu’un contrat aidé, elle ne travaille que 20 h/semaine pour 600 €/mois ». Et tu as enchaîné : « On se débrouillera », incliné, les yeux rivés au sol, grimaçant. Je n’ai rien trouvé à te dire : « Mais je pensais qu’elle était en pleine reconversion ». J’aurais dû te rendre la monnaie de ta pièce et te rétorquer : « C’est ton problème ». Même là, j’aurais aimé te venir en aide.

Et c’est à ce moment précis que je me suis aperçue que j’avais encore des ressources en moi, et que c’est moi que je devais absolument aider, cajoler, comprendre et accepter avec bienveillance afin d’explorer mes capacités infinies. En fait, je te remercie d’être parti, tu laisses place à mes aspirations les plus profondes et je peux enfin me réaliser. Tu m’apprends que je mérite bien mieux, que je peux prétendre au meilleur, à la meilleure version de moi-même, tout particulièrement sans toi, et avec l’homme avec qui je peux rêver de me construire et de faire ma vie, de finir ma chienne de vie.

La rupture fait mal, savoir qu’une autre femme me remplace aussi tôt me déchire le cœur. Je finis par te laisser la responsabilité de tes actes. Et c’est mieux que bien !

 

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